il existe des lieux capables de rétablir l'ordre, d'instaurer un semblant de calme, d'apaiser la fureur du monde. C'est quelque part dans le nord de l'île japonaise de Honshū que trouvent un espace protégé les protagonistes du roman Le peintre d'éventail, écrit par Hubert Haddad et publié par les éditions Zulma, toujours attentives aux sensibilités littéraires du monde entier. Là-bas, dans la maison-refuge gérée par l'énigmatique madame Hison, vivent des personnages aux limites de l'imagination, qui ont survécu à de profonds chagrins, à des distructions, à la violence que, assez souvent, la vie impose aux êtres humains.
Entre l'école quotidienne du maître Osaki, dépositaire du secret de la beauté des jardins zen et peintre d'éventails, et les rythmes de la nature japonaise, Matabei cherche à retrouver le silence afin d'étouffer, peu à peu, le vacarme que l'accident mortel qu'il a provoqué a installé dans sa vie.
L'écriture de Haddad, légère, qui n'excède pas dans les adjectifs, même lorsqu'elle se mesure avec la forme de l'haiku, montre que tout équilibre, même celui qui paraît le plus solide, le plus ancré aux fonds marin comme une grande île, est le résultat d'un travail lent et patient, que, malgré tout, un rien pourrait anéantir. Il peut arriver à cause d'un amour intense, d'une maladie ou d'un violent raz de marée que l'on ne peut pas arrêter. C'est à ce point-ci, aux coordonnées temporelles du 13 mars 2011, que la lenteur de la narration de Haddad se relie au présent, mais sans en suivre la vitesse. Parce que Le peintre d'éventail est une histoire calme, qui voudrait continuer au delà de sa fin.
Hubert Haddad, Le peintre d'éventail, Paris, Zulma, 2013